On recycle les cycles

Cambodia 2019 - J Brockley175

UN CLUB KIWANIS JAPONAIS REMET DES VÉLOS EN ÉTAT ET LES PROCURE À DES ENFANTS DU CAMBODGE.

Récit et photos de Jack Brockley

Des bicyclettes, des bicyclettes, encore des bicyclettes. Elles sont partout, elles arrivent au Cambodge par milliers, en provenance de toute l’Asie du sud-est. Elles sont usées, cassées et délaissées. Formant des piles de 2,50 m de hauteur, sur des remorques de touk-touks qui progressent en pétaradant dans les embouteillages de Phnom Penh, elles arrivent au marché Heng Ly, une fourmilière d’ateliers de recyclage qui emplissent étals et rues. C’est là qu’on y remplace les dérailleurs, qu’on change des rayons et qu’on repeint les cadres ternis. Avec un peu de chance, ces bicyclettes se voient dotées d’une sonnette et d’un panier, bien fixés sur leur guidon, et elles sont données à ceux qui constituent les meilleurs propriétaires de bicyclettes au monde : les enfants.

Un chaud mercredi de juin, des Kiwaniens du Cambodge et du Japon avaient disposé une cinquantaine de bicyclettes, guidon contre guidon, dans un coin ombragé de la vaste cour de l’école primaire Sen Sok. Les élèves jouaient avec les sonnettes, appuyaient sur les chaînes comme pour en vérifier la tension et caressaient les étiquettes des cadres portant cette inscription : « Club Kiwanis de Fukuoka, Japon ». Les plus hardis d’entre eux s’étaient mis en selle et pédalaient sur place, profitant du fait que les vélos étaient sur leur béquille et que la roue arrière ne touchait pas le sol.

Six membres du club Kiwanis de Fukuoka avaient fait le voyage du Japon à Phnom Penh pour donner à 50 élèves de Sen Sok ces 50 bicyclettes remises en état dans le marché Heng Ly. Ce fut une journée très spéciale pour ces enfants qui avaient déjà connu bien des épreuves dans leur courte vie. Maints d’entre eux avaient vécu auparavant dans un quartier du centre-ville où les incendies étaient fréquents et parfois tragiques. Peu de temps auparavant, le gouvernement avait relogé les résidents à Sen Sok, un quartier nouveau en cours de construction, à la périphérie nord-ouest de la capitale. Bien que jouissant désormais de conditions d’existence moins dangereuses, les familles souffraient encore de l’impossibilité de satisfaire certains besoins élémentaires.

« Certaines familles n’ont pas les moyens d’acheter, pour leurs enfants, les uniformes qu’ils ont l’obligation de revêtir pour l’école », explique Thor Koeun, ancien président du club Kiwanis de Phnom Penh.

Créé en 2013, le club Kiwanis de Phnom Penh est bien connu pour ses actions en faveur des enfants, car il distribue régulièrement des fournitures ou de la nourriture et achète des uniformes pour les écoles de la région. Par leur implication dans la région Asie-Pacifique de Kiwanis, les Kiwaniens du Cambodge s’associent à la même volonté d’aider qui anime les autres Kiwaniens. En collaboration avec les écoles de la région, le club de Phnom Penh dresse la liste des articles nécessaires et la communique aux autres clubs d’Asie, dont les membres viennent au Cambodge, apportant en cadeau du savon, du shampoing, du sucre, du riz et – ce qui a peut-être la préférence des élèves – des vélos.

Il y a trois ans, le club Kiwanis de Fukuoka a mis en place un jumelage avec les Kiwaniens de Phnom Penh et est venu donner 50 bicyclettes aux élèves de l’école secondaire Hun Sen Kompong Phnom. En juin passé, il est revenu au Cambodge ; à Sen Sok, cette fois-ci.

« L’école primaire Sen Sok compte un bon millier d’élèves », explique Uk Chanveasna, président du club Kiwanis de Phnom Penh, « sur ce total, l’école a répertorié 165 enfants indigents. Étant donné qu’il n’y avait que 50 vélos, la liste des bénéficiaires a été restreinte aux plus pauvres parmi eux, tandis que les 115 autres enfants se voyaient remettre des fournitures ».

Après une cérémonie de présentations et de brefs discours, avec l’interprétation d’une chanson par les enfants, les Kiwaniens conduisirent les 50 élèves sélectionnés, un par un, jusqu’à leur nouveau vélo. Une jeune fille prit possession de son vélo vert à 10 vitesses en serrant fortement le panier dans ses bras. Un garçonnet extirpa sa monture du groupe de vélos qui attendait, s’éloigna à pied en contournant une classe et inspecta son nouveau vélo hors de la vue des autres. Les enfants pincèrent les pneus, serrèrent les poignées de frein et firent retentir un concert de sonnettes dans la cour.

Naofumi Sato, le président du club Kiwanis de Fukuoka, était ravi.

« Les petits cambodgiens étaient particulièrement exaltés », raconte Naofumi Sato, «  et le fait que notre projet a aussi bien fonctionné nous a convaincus de son utilité ».

Des bicyclettes, des bicyclettes. Des bicyclettes pour aller à l’école. Des bicyclettes pour aller chez des amis. Des bicyclettes pour faire des commissions. Des bicyclettes pour s’amuser.

Des bicyclettes pour les enfants.

Cambodia 2019 - J Brockley151


 

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